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L’Autre, mon semblable. La question de la nature humaine
lundi 04 février 2013

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Descriptif

Conférence donnée par Michel Malherbe dans le cadre des Lundis de la Philosophie 2012-2013, cycle organisé par Francis Wolff (département de philosophie de l'École normale supérieure).

"Imaginons un philosophe levinassien accompagnant les Conquistadors en Amérique. On sait comment les Conquistadors traitèrent les Indiens. Le philosophe tente d’argumenter et dit :

« Ces êtres, je l’avoue, sont singuliers et tout est étrange chez eux. Incontestablement, ce sont des Autres, d’autant plus autres qu’ils sont plus autres. Une figure de l’altérité – le Visage – nettement plus intéressante que celle de la féminité. Honorons donc en eux une humanité radicalement différente ». 

Le chef des Conquistadors, philosophe à ses heures, répond : « Nous n’avons rien en commun : nous aimons l’or et eux, les colifichets. Et, puisqu’ils sont radicalement autres, traitons-les comme tels. Ce ne sont pas des hommes ».

Un jésuite intervient dans la conversation : « En vérité, nous ne savons pas si ce sont ou non véritablement des hommes ou quelque espèce d’êtres inférieurs. Ils sont incapables de réciter le Pater en latin. Mais, dans l’incertitude, baptisons-les et considérons-les comme des chrétiens ». Ce qui était à l’époque la façon de les traiter comme des personnes.

Le chef des Conquistadors : « Tout ce que dit la Sainte Eglise est juste, mais c’est faire comme si, et ce « comme si » me gêne grandement. Je suis un bon chrétien qui sait voir en ses concitoyens des fils de Dieu (i.e. des personnes). Mais avant de reconnaître à ces sauvages des droits et de me découvrir des devoirs à leur égard, encore faut-il que je sache si nous avons quelque raison légitime de les traiter ainsi, et donc si ce sont réellement des êtres humains ».

Le philosophe devenant lockien pour les besoins de la cause : « La question n’est pas de savoir si nous les reconnaissons comme des êtres humains, mais s’ils sont conscients de leur propre identité ; si oui, cela fait d’eux des personnes et c’est assez, quelles que soient leurs manières ».

Le chef des Conquistadors : « Mais comment savoir s’ils sont conscients de leur propre identité ? Ils ne semblent même pas avoir le sens de la propriété, ce qui est pourtant le signe le plus marquant de l’identité personnelle ». 

Le philosophe, acculé dans ses retranchements et revenant à la scolastique de ses maîtres : « Ce sont des êtres animés, bipèdes et mammifères. Certes, ils font des sacrifices humains, mais il est difficile de leur nier toute faculté rationnelle : ils palabrent et savent faire du troc. En ce sens, ils satisfont, sur un mode mineur je l’avoue, à ce qui définit l’essence humaine ».

Le chef des conquistadors : « Mode mineur ! Mais ce sont des sauvages! Ils ne parlent ni l’espagnol ni le latin ; Et s’ils parlent entre eux, c’est à la façon des singes. Quant à leur faculté rationnelle, permettez-moi d’en douter : ils n’aiment pas l’or et ne semblent pas très habiles à compter la monnaie ou à soupeser un lingot. Dans la grande chaîne des êtres, ils représentent sans doute une espèce intermédiaire. Assez de bavardage. Faisons-en des esclaves. Voyez, ils ne se révoltent même pas  ».

Se tournant vers ses troupes : « Séparez les mâles des femelles ; emmenez les premiers à la mine ; laissez-en quelques-uns avec les femelles pour la reproduction ».

Question : Quel argument suggérer au philosophe pour empêcher un traitement aussi…inhumain ?" 

 

 

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Auteur(s)
Michel Malherbe
Université de Nantes
Professeur émérite

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Cursus :

Michel Malherbe est un philosophe français, professeur émérite à l'Université de Nantes. Spécialiste de l'empirisme anglo-saxon, il est traducteur de Bacon, Locke et Hume. Ses travaux actuels sont principalement consacrés à la philosophie de langue anglaise et à l'empirisme, et plus particulièrement à la philosophie écossaise (philosophie du sens commun, philosophie de la nature humaine, etc.). Il dirige les collections Analyse et philosophie et Bibliothèque des philosophies chez Vrin.

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Dernière mise à jour : 12/06/2013