Conférence de Danielle Constantin sur l'oeuvre de Jack Kerouac , "On the Road "(The Original Scroll).
Le rouleau original de On the Road (publié en 2007 ; traduction française, 2010) est non seulement un avant-texte (première version complète du texte), mais aussi et surtout un texte autobiographique. Kerouac raconte les voyages qu'il a faits entre 1947 et 1950 en utilisant les noms réels (personnes et lieux). S'il a changé les noms propres dans la version qui sera publiée en 1957, c'est principalement pour éviter que les personnes du texte soient reconnues, ce qui, selon son éditeur, aurait pu poser des risques de poursuites pour libelle. D'ailleurs dans tous les romans autobiographiques de Kerouac, lesquels constituent ce qu'il a appelé The Legend of Duluoz, il a utilisé un système onomastique fictionnel, différent d’un texte à l’autre. Il avait le projet, à la fin de sa vie, de tout rendre homogène afin que l'ensemble de ses real life novels forme une saga qui raconterait les différentes périodes de sa vie. Sa mort prématurée en 1969 à l’âge de 47 ans l’a empêché d’accomplir cette tâche.
Je présenterai d'abord les grandes lignes du récit de la genèse (en m'appuyant sur les manuscrits, la correspondance et les journaux publiés) pour ensuite examiner la censure dont a fait l'objet le texte en rapport principalement avec la représentation de l'homosexualité masculine (pour cela, je ferai une comparaison entre le rouleau et le texte publié). Rappelons qu’aux États-Unis dans les années 50, les éditeurs ne badinaient pas avec ce sujet, craignant de subir des procès pour obscénité (Allen Ginsberg et William Burroughs ont d'ailleurs fait les frais de telles poursuites, respectivement pour Howlet TheNaked Lunch).
Le texte de Kerouac n'est pas un texte féministe, et les femmes n'y ont pas toujours un rôle intéressant (on est dans les codes stéréotypés de l'époque entre idéalisation et objectification). Or en lisant un ouvrage féministe intitulé Women of the Beat Generation de Gloria Knight (1996), j'ai découvert que beaucoup des femmes du texte ont par la suite écrit leurs mémoires. En fait, deux anciennes femmes de Kerouac et trois girlfriends ont pris la plume pour raconter leur histoire et leur expérience de l'époque (Edie Kerouac-Parker, Joan Haverty-Kerouac, Carolyn Cassady, Joyce Johnson, Helen Weaver). C'est quand même remarquable. J'en parlerai un peu (ça pourrait d’ailleurs constituer le prochain volet de mes recherches autour de l'œuvre de Kerouac).
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Cursus :
Danielle Constantin est docteur en littérature comparée, linguiste et professeur associée à l'ITEM (Institut des textes modernes-CNRS/ENS ) dans l'équipe Genèse et Autobiographie.
Cliquer ICI pour fermerDernière mise à jour : 20/08/2013