Exposé de Thomas Heams (maître de conférence AgroParisTech, chercheur Inra) dans le cadre du Séminaire Cavaillès (Histoire et Philosophie du vivant) organisé par la République des Savoirs.
Depuis quelques années, des constructions de laboratoire défient les frontières habituelles de l’animalité. Des ébauches d’organes sont cultivées (organoïdes), des agrégats cellulaires sont conçus pour se déplacer, voire se diviser selon des modalités originales (xenobots). Ces productions esquissent des pistes nouvelles et des échelles nouvelles pour ressourcer la biologie de synthèse, jusqu’à présent principalement centrée sur les « circuits génétiques » d’êtres unicellulaires, et elles s’accompagnent d’un discours qui semble renforcer la métaphore de l’animal-machine dans la description des vivants. Or, cette métaphore est elle-même en crise, sous les feux croisés d’une biologie expérimentale plus intégrative et moins réductionniste, et de perspectives critiques en philosophie de la biologie. Ces nouvelles entités de laboratoires sont-elles la béquille d’une épistémologie dépassée du vivant, ou nous permettent-elles à l’inverse de mieux reconsidérer l’originalité de la biologie, et en particulier le territoire de l’animalité ?
Le séminaire Cavaillès: perpétuant les orientations impulsées par Jean-Jacques Kupiec lors de sa création, le séminaire Cavaillès se donne pour objet l’histoire et la philosophie des sciences du vivant. Une fois par mois un acteur des sciences expérimentales ou humaines est invité à y présenter ses travaux et réflexions.
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Cursus :
Thomas Heams est maître de conférences en génomique animale à AgroParisTech, et chercheur à l’INRA. Il enseigne les biotechnologies et l’histoire des idées scientifiques.
Biologiste moléculaire et cellulaire de formation, il a contribué à documenter l’hétérogénéité et l’imprévisibilité des fonctionnements cellulaires. Ses enseignements et recherches actuels partent d’une réflexion critique sur le concept de vivant-machine, et portent sur les définitions du vivant, l’épistémologie critique des biotechnologies du génome, l’histoire des idées évolutionnistes et les relations homme-animal.
Il a co-dirigé Les Mondes Darwiniens. L’évolution de l’évolution (2009, réédition aux Éditions Matériologiques 2012), avec Philippe Huneman, Guillaume Lecointre et Marc Silberstein. Il est administrateur des Éditions Matériologiques.
Il a publié un premier roman, Cent seize Chinois et quelques (Seuil, 2010), évoquant l’internement d’une centaine de Chinois dans un camp des Abruzzes de l’Italie fasciste entre 1941 et 1943.
Dernière mise à jour : 27/06/2024