Conférence donnée par Olga Anokhina dans le cadre du colloque International « Vladimir Nabokov et la France », organisé par Les Chercheurs enchantés : Société Française Vladimir Nabokov.
Notre contribution aura pour objet d’étude l’utilisation par Nabokov de la langue française. L’étude exploratoire des documents de travail, de correspondance et de traductions de Vladimir Nabokov conservés à la Bibliothèque du Congrès (Washington, USA) et à New York Public Library (NY, USA) nous a permis d’observer la place qu’occupait la langue française dans la création littéraire et dans l’activité linguistique quotidienne de l’écrivain. En effet, l’analyse des œuvres publiées, des manuscrits, des traductions et de la correspondance de Vladimir Nabokov montre le fonctionnement cognitif d’un écrivain multilingue où l’usage de la langue française occupait une place d’égale importance avec l’anglais et le russe.
Pour illustrer notre propos, nous nous appuierons sur des exemples concrets comme cette lettre de Nabokov à Michael Glenny où une expression française vient interrompre l’écriture en anglais : « I have reworked a number of descriptive passages (enclose dis a little list of mistranslations à titre documentaire) ». Nous allons montrer que ce phénomène peut être observé dans différents écrits de l’écrivain. Nous évoquerons aussi les stratégies utilisées par Nabokov pour rendre accessible à son lecteur anglophone des interférences en langues française et russe qui abondent dans ses romans. Nous essayerons de comprendre pourquoi, notamment dans le texte d’Ada or ardor qui contient un grand nombre d’expressions françaises, Nabokov trouve superflus de les traduire en anglais, contrairement à des incursions en langue russe.
L’observation des documents de travail de Nabokov, comme par exemple, le manuscrit de la nouvelle Mademoiselle O écrite directement en français, les lettres à ses traducteurs français ou à ses amis résidant en France ou encore ses corrections des traductions françaises de Maurice-Edgar Coindreau ou de Georges Magnane témoigne de la maîtrise exceptionnelle de la langue française et nous laisse à penser que Nabokov aurait pu devenir l’écrivain français. Si cela restera à jamais une supposition, il est incontestable – et nous nous attacherons à le montrer dans notre contribution – que les langues russe, anglaise et française constituaient le fondement du multilinguisme de Nabokov et que l’écriture en français était pour lui tout aussi naturelle que celle en sa langue maternelle ou en sa langue d’adoption.
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Cursus :
Olga Anokhina est linguiste, chercheur à l'Institut des Textes et Manuscrits Modernes (UMR 8132 CNRS/ENS) et consacre ses recherches à la genèse des œuvres des écrivains multilingues. Une partie de ses travaux porte sur les noms abstraits en français et l’approche linguistique et interdisciplinaire de l’abstraction. Olga Anokhina s'intéresse également aux aspects cognitifs de la production écrite, du multilinguisme et de la création.
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