Exposé de Philippe Gaudin sur « Enseigner les faits religieux, former à la laïcité : politique ou panique publique en France à l’école de la fin des années 1980 à aujourd'hui ? », dans le cadre du Séminaire Politiques publiques en matière religieuse en Europe, organisé par le département de Géographie de l'ENS.
Par rapport à l’intitulé initial « Enseigner les faits religieux, former à la laïcité : politique ou panique publique en France à l’école de la fin des années 1980 à nos jours », je prendrai le parti d’élargir le propos, ce qui sera aussi une forme d’introduction générale au séminaire, au moins du point de vue du cas français. Notons qu’il sera difficile de passer sous silence le lancement très récent de la Fondation pour l’islam de France.
En France la question de politiques publiques en matière religieuse résonne comme un paradoxe, au moins pour les affaires intérieures et si on laisse de côté l’exception de l’Alsace Moselle. En effet, le lieu commun d’une laïcité séparatiste laisse entendre qu’il ne peut y avoir de politiques publiques touchant directement ou indirectement le religieux.Poser cette question implique de comprendre la situation dans laquelle se trouve la République française eu égard à sa pratique de la laïcité depuis les années 1980 et inversement, ces politiques publiques, si elles existent, sont très révélatrices de la spécificité de cette situation.
Le titre initial de la communication a volontairement quelque chose de provocateur en ce sens que depuis le printemps 2014 exactement (Conseil des ministres qui lance officiellement une politique de « prévention de la radicalisation ») et, a fortiori, depuis les attentats de 2015 et 2016, on est en face de tentatives empressées où il faut faire à grands pas ce qui n’a jamais été fait et qu’on ne sait pas bien faire (la question du rapport entre « radicalisation » et islam ne risque pas d’être close avant longtemps) ou ce qui a déjà commencé à être fait mais sans une forte volonté politique.
Nous examinerons donc les questions soulevées par l’enseignement des faits religieux dans l’enseignement public, par la formation à la laïcité destinée aux fonctionnaires, par les politiques publiques concernant les aumôneries, par la prévention de la radicalisation et par la formation des cadres religieux, notamment musulmans.
Nous tenterons de montrer qu’il y a bien des politiques publiques en matière religieuse en France, mais qu’elles restent malaisées et toujours sujettes à contestations et résistances dans la mesure où elles sont révélatrices de mutations tellement profondes que la France n’a pas pu, pas su et pas voulu s’y préparer, intellectuellement et politiquement.
Voir aussi
Cursus :
Philippe Gaudin est philosophe, directeur adjoint de l'Institut européen en sciences des religions, École pratique des hautes études.
Cliquer ICI pour fermerDernière mise à jour : 09/06/2017